Rites et symboles
Toutes les sociétés humaines, depuis la nuit des temps, ont leurs rites et leurs symboles. Ils sont inséparables des civilisations : rites funéraires, rites religieux, rites militaires, prestations de serment judiciaire, rites matrimoniaux, rites de salutations, etc. Les symboles ne sont pas moins nombreux. Les uns et les autres sont partagés par un grand nombre de personnes qui les reçoivent comme une évidence. Comme au sein de toute société initiatique, le Compagnonnage possède ses rites et ses symboles, mais comme ils sont moins extériorisés et pratiqués seulement par un petit nombre de personnes, ils suscitent la curiosité.
Certains rites sont encore pratiqués à l’extérieur : la conduite (cortège organisé pour le départ d’un compagnon), la guilbrette (accolade au cours de laquelle les compagnons boivent bras dessus bras dessous), la chaîne d’alliance (à minuit, à l’issue de la fête patronale, ou autour du cercueil d’un compagnon décédé). D’autres sont pratiqués uniquement entre compagnons, dans leurs sièges : rites d’entrée de chambre précédant une réunion, rites de réception. Le pèlerinage à la Sainte-Baume, en Provence, constitue également une étape spirituelle pour les compagnons du Devoir.
Dans tous les cas, leur fonction est de transmettre une morale, d’affirmer la fraternité du groupe, d’éduquer, de conférer de la dignité, d’élever l’ouvrier au-dessus de ses actes quotidiens. L’exécution stricte d’un rite pousse à la maîtrise de soi, ce qui, au sein d’un groupe de jeunes gens jadis turbulents, n’était pas inutile pour les intégrer plus tard au sein de la société.
Tout comme les rites, les symboles du Compagnonnage sont un langage qui n’est plus composé de gestes mais d’images.
Sa fonction renforce la cohésion du groupe car il est d’abord transmis et compris par ses membres. Le symbole suscite les questions, excite l’imagination et la recherche, plus qu’une parole ou un écrit.Le florilège des symboles compagnonniques est important et il a évolué selon les époques et les corps de métiers. Il en existe qui sont liés aux couleurs (le rouge pourra signifier la force ou le courage, le blanc la lumière, la pureté).
Les outils aussi sont des symboles : le compas évoquera les notions de précision, de juste mesure, de pensée ou de divin. L’équerre, celles de droiture, de conformité à la règle, ou encore de matière. Le niveau symbolisera l’égalité, la balance, la justice.
Certains symboles sont issus de l’Antiquité gréco-romaine et de la Bible : le labyrinthe suggèrera le parcours difficile du candidat à la réception, la tour de Babel, l’échec inévitable d’un parcours inspiré par l’orgueil.
Enfin, la vie et les vertus de fondateurs légendaires ont donné aux compagnons le sentiment d’être issu d’un passé glorieux, souvent associé à la construction du temple de Salomon. Les légendes de Maître Jacques, du Père Soubise, du roi Salomon et de son architecte Hiram s’élaborent en réalité assez tard, aux XVIIIe et XIXe siècles. Les épisodes de leur vie et de leur mort servent de modèles pour guider le nouveau compagnon sur les valeurs de son Devoir.