Les images des compagnons
Assez fréquents après les années 1840 sont les dessins ou épures exécutés par des compagnons charpentiers, menuisiers et tailleurs de pierre, lorsqu’ils accomplissaient leur tour de France. Ils apprenaient le « trait », c’est-à-dire la manière de dessiner les figures géométriques qui vont servir à couper le bois et la pierre, assembler les sections et former des ensembles. Ces cours étaient suivis par les jeunes compagnons au domicile de certains anciens qualifiés, en général durant l’hiver. Le compagnon conservait précieusement ces épures, formés de lignes en pointillés, souvent complexes, car elles lui serviraient plus tard dans son métier, qu’il soit patron ou demeure ouvrier. Il n’est pas rare que ces dessins soient signés et datés, accompagnés du surnom du compagnon, en toutes lettres ou seulement sous forme d’initiales.
Mais attention : les écoles de trait accueillaient aussi des ouvriers qui ne devenaient pas compagnons et certaines écoles, financées par la ville, étaient municipales (ainsi, à Tours, à Blois, à Bordeaux, à Montpellier, des cours de trait étaient dispensés dans le cadre de l’école des Beaux-Arts ou de la Société Philomatique de Bordeaux).
Que peut-on encore découvrir au sein du patrimoine familial ? Des dessins aquarellés ou des lithographies, acquis par le compagnon durant son tour de France à titre de souvenirs ; des livres (surtout des recueils de chansons) ; des journaux (la presse compagnonnique apparaît vers 1880 avec des titres tels que Le Ralliement des Compagnons du Devoir, La Fédération Compagnonnique, L’Union Compagnonnique, puis Le Compagnon du Tour de France, Le Compagnonnage…).
Dans le domaine des supports en papier, il faut mentionner les photographies. A partir des années 1860, parfois un peu plus tôt, les compagnons prennent l’habitude d’immortaliser le jour de leur réception en se faisant photographier, revêtus de leurs couleurs et tenant leur canne. Ces petites photos sur carton fort sont assez répandues. Fréquentes aussi sont les vues de groupes prises lors des fêtes patronales. Tous les compagnons posent avec leurs attributs, en présence de la mère et de son mari, parfois avec un grand chef-d’œuvre au milieu d’eux. Lorsque le compagnon a apposé une croix à côté de son visage, ou lorsqu’il a écrit sous la photo le nom de tous ceux qui l’assistaient, quelle aubaine !