L'histoire du Café Breton, siège des Compagnons du Devoir
Tous les Tourangeaux connaissent le café Breton, alias hôtel Saint-Jean, au 13, place des Halles. Le bâtiment est toujours propriété de l’Alliance compagnonnique Jacques-Soubise, dont les locaux sont à deux pas, au numéro 9.
Mais connaît-on l’histoire de cet établissement dans ses relations avec le Compagnonnage ? En voici les grandes lignes. C’est aussi une véritable saga de tonneliers…
1 - LA NAISSANCE DU "CAFE BRETON"
Et d'abord, pourquoi "café Breton" et hôtel "Saint-Jean" ? Certains pensent que c'est une allusion au "breton" (ou "berton", comme disaient les vieux Tourangeaux). Le breton est le vin issu du cépage cabernet franc, celui qui produit notamment le chinon et que Rabelais citait dans Gargantua (chapitre III) : "J'entends de ce bon vin breton, lequel ne croît en Bretagne, mais en ce bon pays de Verron." Et du "berton", il en a coulé dans les murs du 13, place des Halles ! Mais il n'en est rien car le café Breton doit son nom à son fondateur, dont nous allons conter l'histoire plus loin. Quand à l'enseigne "Saint-Jean", il s'agit d'une dédicace au patron des tonneliers, saint Jean-Baptiste, lequel, selon eux, aurait été décapité avec une doloire, la lourde hache dont ils se servaient pour façonner les douelles de leurs fûts.
L’histoire débute à Saint-Arnoult (Loir-et-Cher), le 29 octobre 1819. Ce jour-là, François BRETON, un cultivateur, et Madeleine LOUIS, son épouse, déclarent la naissance de leur fils Nicolas Toussaint. Ce garçon sera reçu compagnon doleur (tonnelier) à Cognac en 1847 sous le nom de Blois la Prudence. Il s'établit à Tours au milieu du XIXe siècle, au 11, rue des Fossés-Saint-Clément.
Le 21 février 1854 il épouse Louise MAGDELAINE, née à Saint-Germain-du-Val (Sarthe), le 27 avril 1822. Elle est la fille d’un couple de cultivateurs alors établis à Bazouge (Sarthe) et elle travaille comme gagiste (employée) à Paris.
Le numéro 11 de la rue des Fossés Saint-Clément doit à peu près correspondre à l’emplacement de l’actuel café Breton. Son adresse est un peu fluctuante (au 11, au 19), mais en 1882 la famille Breton est bien établie au n° 13 de la place Saint-Clément créée à partir de la rue élargie. C’est l’actuelle place des Halles.
Toussaint Breton est un tonnelier et comme beaucoup d’autres, il est aussi marchand de vins et tient un comptoir. Les affaires marchent bien. La famille s’agrandit.
La première fille du couple, Marie Louise, née en 1859, se marie le 28 novembre 1882 à… un tonnelier nommé Jean-Pierre TERTRAIN. Lui aussi était un compagnon, né à Beaumont-la-Ronce (37) en 1858 et reçu à Beaune en 1878 sous le nom de Tourangeau le Coeur Sincère. Leur fils Georges, né en 1890, sera également reçu compagnon tonnelier-doleur en 1910 sous le nom de Tourangeau le Bien Estimé.
La seconde fille, Joséphine Léontine, est née en 1862. Le 1er juin 1886 elle épouse Ferdinand LEGEAY. C'est encore un compagnon tonnelier, né à Saint-Vincent-du-Lorouër (Sarthe) en 1857 et reçu compagnon en 1883 sous le nom de Manceau la Bonne Conduite.
Leur union est de courte durée puisque Joséphine meurt le 1er juillet 1889. Ferdinand LEGEAY est entre-temps devenu le gérant ou le propriétaire du café-restaurant de son beau-père. Ce dernier l’avait développé et en avait fait un hôtel pourvu de remises et d’écuries, car le quartier était devenu le centre du commerce de gros depuis la construction des halles en 1866.
Le 2 février 1891 Ferdinand LEGEAY se remarie avec Marie PASGE (Pasgé), une cuisinière née à Betz-le-Château en 1860. Elle est veuve d’un machiniste des chemins de fer, depuis 1887.
Quant au fondateur du café-restaurant, Toussaint BRETON, il décède le 21 septembre 1897. Devenu « rentier » selon l’acte de décès, il s’était retiré des affaires et vivait rue Eugène-Suë.
Avec le nouveau siècle commence l’histoire du siège des compagnons du Devoir et de la Mère LEGEAY.
A découvrir le mois prochain...